Une table de cinq au café Lutèce du boulevard Saint-Michel. Je suis assis aux côtés d'irakiens soixantenaires qui discutent de tout et de n'importe quoi. La conversation est surréaliste. "J'ai perdu quatre frères en Irak. Le premier a été tué par l'armée du mehdi, le second par les Américains, le troisième par le parti Dawa et le quatrième par des pillards" dit Shakir. Abed Ali répond : "moi mon père est mort sous les bombardements américains. Il n'a pas été tué par le missile mais une crise cardiaque l'a achevé quelques instants après". Choc et stupeur.
Un troisième reprend : "ils ont kidnappé un de mes neveux et ont demandé une rançon. Nous avons payé mais ils l'ont quand même tué".
J'écoute. J'absorbe tout.
Et je comprends, une fois n'est pas coutume, que la situation en Irak touche tout le monde. Les victimes sont innombrables et les dégâts causés par l'invasion américaine vont se répercuter pendant des années. Le pire, c'est que cette conversation est devenue banale. Les Irakiens rient, ironisent, sur ces faits. Mais les visages, eux, sont marqués. Ils disent la vérité.
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